ANGÉLIQUE

Marquise des anges, le retour

Nora Arzeneger reprend le rôle immortalisé par Michèle Mercier (©Silvia Zeitlinger/EuropaCorp)
Nora Arzeneger reprend le rôle immortalisé par Michèle Mercier (©Silvia Zeitlinger/EuropaCorp)

C'est l'une des amoureuses les plus belles et rebelles du cinéma français. Près d'un demi-siècle plus tard, revoici ANGÉLIQUE, la marquise des anges.
L'héroïne a aujourd'hui les traits de Nora Arnezeder, 24 ans, dans le remake réalisé par Ariel Zeitoun, qui sort ce mercredi 18 décembre sur les écrans. En 1964, pour sa première apparition au cinéma, elle était incarnée par Michèle Mercier, 25 ans, dans le film de Bernard Borderie.
A l'époque, huit romans d'Angélique étaient déjà parus, depuis les années 50, et certains notamment sous la forme de feuilletons dans France-Soir. Leurs auteurs, Anne et Serge Golon, vendront au total 150 millions d'exemplaires de leurs livres.
De 1964 à 1968, cinq films furent réalisés par Bernard Borderie. Mais Anne Golon n'avait pas aimé ces adaptations et s'était fâchée avec les scénaristes. Aujourd'hui, elle dit être davantage séduite par le remake d'Ariel Zeitoun.
''Quelque chose me disait que le projet d'Ariel ne me trahirait pas et qu'avant mes 100 ans –j'en ai 91 aujourd'hui–, j'aurais la chance de voir une version cinématographique d'Angélique correspondant enfin à mes attentes. Voilà qui est fait: grâce au film, j'ai le sentiment d'une nouvelle vie qui commence'', dit la vieille dame, qui a bataillé pendant une dizaine d'années pour récupérer les droits de ses livres auprès de ses éditeurs.
Angélique est une jeune femme de la fin du XVIIème siècle que sa famille marie de force à un homme qu'elle n'aime pas: le comte Joffrey de Peyrac, riche mais boiteux et défiguré par une cicatrice.
''Vous êtes encore plus belle qu'on me l'avait annoncé. Et moi sûrement plus laid qu'on vous l'a raconté'', dit celui-ci à sa future femme, à leur première rencontre.
''Je ne vous appartiendrai jamais. Jamais je ne vous laisserai me toucher'', dit Angélique à son époux, après leur mariage qu'elle célèbre en veste, pantalons et bottes. ''Vous avez raison: c'est vous qui viendrez à moi'', répond l'époux, patient, gentleman, et qui finira par avoir raison.
Car, c'est bien connu depuis Cyrano, toute beauté est intérieure: Angélique va s'apercevoir que Peyrac est une belle personne, qui l'aime et la respecte, et va vite tomber dans ses bras –au diable la cicatrice et la jambe qui boite.
Mais les aventures de la belle marquise ne seront pas que sentimentales. Quand elle était adolescente, elle a été témoin d'un complot d'empoisonnement contre le roi Louis XIV. Elle va donc se trouver mêlée aux luttes de pouvoir et aux intrigues de la Cour...
Dans son remake, Ariel Zeitoun (réalisateur notamment de SAXO, LE NOMBRIL DU MONDE ou LE DERNIER GANG) a fait de Joffrey de Peyrac un homme plus âgé et plus expérimenté que dans le roman et que le Robert Hossein des films des années 60. C'est Gérard Lanvin qui donne ici sa maturité et son assurance au personnage.
De son côté Nora Arzeneder (qui s'était fait connaître dans FAUBOURG 36 en 2008 à l'âge de 18 ans) n'a rien à envier à la mythique Michèle Mercier, avec ses yeux verts, sa silhouette parfaite et son visage qui prend admirablement la lumière.
Mais Angélique n'est pas seulement belle, elle est volontaire et insoumise, se battant pour son mari, pour ses enfants, contre l'arbitraire et l'oppression. Le scénario insiste sur cette force de caractère, comme dans les romans dont c'était l'une des originalités, dans les années 50 où le rôle de la femme était à s'occuper des enfants et à faire la cuisine plutôt que de se battre aux côtés de son mari contre l'injustice et l'adversité.
Dans les premières minutes du film, certaines scènes de dialogue sonnent un peu faux, les acteurs semblent réciter leur texte et l'enchaînement des scènes n'est pas parfait. Mais ces défauts s'estompent au fil de l'histoire, à mesure que les péripéties se multiplient et que le montage efficace, les décors et les costumes soignés, la lumière bien utilisée donnent au film un label de qualité.
Tomer Sisley, Mathieu Kassovitz et Simon Abkarian (dans le rôle de l'avocat protecteur d'Angélique, jadis joué par Jean Rochefort) complètent notamment le casting de ce remake qui ne manque pas de scènes de duels et de sensualité: la scène d'amour initiale entre Nora Arnezeder et Gérard Lanvin ne dépasse pas les limites de la pudeur mais est résolument moderne.
Le film se termine par le panneau ''Fin de la première partie''. Il y a, dans les romans d'Anne et Serge Golon, beaucoup de matière à exploiter, mais la suite n'est pas encore tournée, ni même prévue.
Elle dépendra peut-être du succès de ce premier remake. En tout cas elle est écrite, et ''s'est posée la question de la tourner dans la foulée de la première'', explique le réalisateur. ''J'ai choisi d'attendre. La deuxième partie est très différente de la première: les décors ne sont pas les mêmes –beaucoup de scènes se déroulent à Versailles–, l'état d'esprit est différent, les années ont passé et changé les personnages. (…) Tous, acteurs et techniciens, avons convenu de laisser passer un peu de temps, tout en nous tenant prêts''.
Jean-Michel Comte

LA PHRASE
''Vous êtes encore plus belle qu'on me l'avait annoncé. Et moi sûrement plus laid qu'on vous l'a raconté'' (Gérard Lanvin à Nora Arnezeder, à leur première rencontre).

ANGÉLIQUE
(France, 1h53)
Réalisation: Ariel Zeitoun
Avec Nora Arnezeder, Gérard Lanvin, Tomer Sisley
(Sortie le 18 décembre 2013)