Un mariage et un enterrement (et plus, si affinités)
Le générique du début montre une répétition d'orchestre, et on comprend tout de suite: ce sera un film choral. Pour son cinquième film comme réalisatrice (après LA BÛCHE, DÉCALAGE HORAIRE, FAUTEUILS D'ORCHESTRE et LE CODE A CHANGÉ), Danièle Thompson a choisi de multiplier les personnages, dont les destins s'entremêlent.
Il s'agit principalement ici de personnages qui ont, entre eux, des liens familiaux. Le week-end où Roni (Kad Merad), riche diamantaire bling-bling, marie sa fille, son frère Zef (Eric Elmosnino), violoniste très attaché à la religion juive, enterre sa femme morte dans un accident. Ça tombe mal, mais dans un sens ça tombe bien puisque cela va donner l'occasion aux deux frères, que tout oppose, de se revoir et de se parler.
Avant la noce et l'enterrement, la fille de Zef, Noga (Lou de Laâge), musicienne elle aussi, verse des larmes dans l'Eurostar entre Londres et Paris en pensant à sa mère décédée. Dans le train, un beau jeune homme (Max Boublil) la console comme il peut.
Le jour du mariage venu, Roni chante du Sinatra pour les invités de la noce, aux côtés de sa ravissante idiote de femme (Monica Bellucci), dans les jardins de sa grande maison. Pendant ce temps, dans une pièce à l'intérieur, une veillée funèbre est organisée pour la morte, Zef se recueille près du corps et Noga joue du violoncelle.
Et le patriarche (Ivry Gitlis), père de Roni et Zef, atteint de la maladie d'Alzheimer --mais pas trop gravement--, débloque gentiment. Ce n'est que le début de l'histoire, qui se poursuivra à Saint-Tropez...
''Le point de départ, c'est le constat qu'il y a des manières différentes de vivre à Saint-Tropez'', explique en effet Danièle Thompson, qui comme d'habitude a écrit le scénario avec son fils Christopher. ''D'un côté, on trouve les adeptes d'une vie bruyante, rythmée par la fête et qui aiment la foule du port. Et de l'autre, ceux qui, comme nous aujourd'hui, dans le silence des pinèdes, ne recherchent que les coins tranquilles et son atmosphère de forteresse''.
Artistes ou affairistes, financièrement sans soucis, les personnages sont donc des bobos –de Paris, de New York, de Saint-Tropez--, on est loin des frères Dardenne, et quand on fête l'anniversaire du grand-père à la fin du film, cela ne se passe pas au Flunch mais chez Maxim's. Mais ces personnages sont plein de contradictions, et la réalisatrice voulait au début intituler son film DES SENTIMENTS CONTRADICTOIRES –on comprendra pourquoi, au fil de l'histoire.
Parmi la belle brochette de comédiens, une place de choix est donnée aux deux jeunes révélations du film, Lou de Laâge, 22 ans, déjà vue récemment dans JAPPELOUP, et Max Boublil, 33 ans, comique qui prend son envol au cinéma et qu'on verra très bientôt dans LES GAMINS. Ils illustrent bien l'un des objectifs que s'était fixé Danièle Thompson, ''trouver l'équilibre qui permettra à chaque personnage d'exister au milieu des autres pendant l'heure et demie que durera le film''.
Sur ce plan-là, DES GENS QUI S'EMBRASSENT est plutôt réussi. On n'en dira pas autant du scénario (ici coïncidences rime lourdement avec invraisemblances), des dialogues et de l'humour faussement juif new-yorkais (''C'est un peu la Bible et les Pages jaunes, le Talmud''), et de la fin de l'histoire qui frise le grand n'importe quoi. Dommage, car certains personnages attachants méritaient mieux que cela.
Jean-Michel Comte
LA PHRASE
''Oublie tout ce que tu donnes. Souviens-toi de tout ce que tu reçois'' (Ivry Gitlis, à ses deux fils Kad Merad et Eric Elmosnino)
(France, 1h40)
Réalisation: Danièle Thompson
Avec Kad Merad, Monica Bellucci, Eric Elmosnino
(Sortie le 10 avril 2013)