Le hold-up parfait
C’est la magie du cinéma: nous faire croire à des histoires invraisemblables, nous passionner par des rebondissements improbables, nous entraîner dans des successions de coïncidences comme si
c’était monnaie courante.
Dans MAINTENANT OU JAMAIS, c’est bien simple, on y croit ou on n’y croit pas. On rentre dans le film ou pas, on accepte le scénario, finaud, ou on le rejette, lourdaud.
Juliette (Leïla Bekhti) donne des leçons de piano, Charlie (Arthur Dupont) travaille dans une banque, ils ont deux jeunes enfants, viennent d’acheter un terrain en province pour y faire
construire une jolie maison, avec piano, babyfoot et gentil chien.
Le jour où Charlie perd son travail, c’est le début de la dégringolade: plus de revenus réguliers, plus moyen de rembourser les crédits, plus de soutien des banques. Les rêves de bonheur familial
tranquille s’évaporent.
Un malheur n’arrivant jamais seul, Juliette se fait voler son sac, un soir, à l’arraché, par un inconnu qui s’enfuit en courant.
Le petit voyou (Nicolas Duvauchelle) est arrêté quelques jours plus tard par la police. Mais, derrière la glace sans tain du commissariat, Juliette refuse de l’identifier.
Elle préfère l’attendre à la sortie, pour lui réclamer qu’il lui rende son sac et son portable. Et, assez vite, germe dans son esprit une idée folle, au contact de ce malfaiteur tout juste sorti
de prison et qui n’a pas l’air si méchant que ça: l’obliger à organiser, avec elle, le braquage de la banque dans laquelle travaillait son mari…
Le réalisateur Serge Frydman, dont c’est le deuxième film après MON ANGE en 2004 avec Vanessa Paradis,
reconnaît que son scénario de départ ’’n’est honnêtement pas la situation la plus réaliste du monde’’. Il s’y connaît en scénarios puisqu’il a collaboré à ceux de plusieurs films de Patrice
Leconte depuis une vingtaine d’années.
Et il est vrai que lorsque l’on voit Leïla Bekhti taper ’’braquage de distributeurs de billets’’ sur Google pour préparer son casse, on se dit qu’on vit une époque formidable, certes,
mais qu’il ne faut pas exagérer.
Pourtant, une fois assumée l’idée de départ de son histoire, le réalisateur emmène son film sur d’autres voies, dans lesquelles on voit une mère de famille en proie d’une part au surendettement
et aux difficultés financières et, d’autre part, aux dangers d’une relation qui devient peu à peu complice, sinon amicale.
Et du coup, tout finit par devenir crédible, y compris les dialogues entre les deux personnages principaux et le jeu des acteurs, trop caricatural au début (surtout Nicolas Duvauchelle, alors que
Leïla Bekhti est impeccable) mais qui peu à peu se
fluidifie.
Plus on approche de la fin, et plus on se demande ce qu’elle sera. Serge Frydman penche-t-il pour l’option film grand public avec happy end pour les héros sympathiques, ou se la joue-t-il film
intello avec forcément une fin tragique et un retour à la réalité? Eh, ho, ce n’est pas CinéGong qui va vous vendre la mèche…
Jean-Michel Comte
LA PHRASE
’’Personne ne vous a demandé d’avoir des rêves au-dessus de vos moyens, Madame’’ (le banquier de Leïla Bekhti).
MAINTENANT OU JAMAIS
(France, 1h35)
Réalisation: Serge Frydman
Avec Leïla Bekhti, Nicolas Duvauchelle, Arthur Dupont
(Sortie le 3 septembre 2014)