Un couple qui bat de l'aile obligé d'accueillir sous son toit sa fille et son petit ami: c'est un conflit de générations qui s'annonce dès le début de CHACUN CHEZ SOI, deuxième film réalisé par Michèle Laroque.

L'actrice-réalisatrice y joue elle-même le rôle principal, celle de Catherine, une prof d'économie en disponibilité qui se sent délaissée par son mari Yann (Stéphane De Groodt) malgré –ou à cause?– de nombreuses années de mariage sans nuages. Ce dernier, qui a vendu sa boîte de vente de vêtements sur Internet, est un doux rêveur qui passe son temps à la maison et s'est pris d'une passion dévorante et maniaque pour les bonsaïs.

Virés de leur appartement

Leur fille Anna (Alice de Lencquesaing) passe sa thèse à Sciences Po et vit avec son petit ami Thomas (Olivier Rosemberg). Mais celui-ci est viré à la fois de l'agence de tourisme dans laquelle il travaillait et de l'appartement dans lequel le jeune couple habitait.

Yann propose alors d'accueillir Anna et Thomas sous leur toit, dans la grande maison qu'il habite avec sa femme. Celle-ci n'est pas emballée par cette idée: à son couple qui bat de l'aile s'ajoute un couple d'intrus avec lequel la vie quotidienne ne s'annonce pas de tout repos…

C'est le deuxième film de Michèle Laroque comme réalisatrice après BRILLANTISSIME en 2018, histoire d'une femme (interprétée par elle-même) quittée par son mari et délaissée par sa fille et sa meilleure amie, et qui fait le bilan de sa vie. Un titre de film qui ne s'appliquera pas à cette deuxième réalisation, Chacun chez soi, qui se veut une comédie de mœurs mais rate la cible de l'humour et de l'originalité.

Tout sonne faux

Car tout sonne faux dans le film –le scénario, les situations et rebondissements, le jeu des acteurs, les dialogues souvent poussifs voire insignifiants: "Deux couples au même endroit, ça ne marche jamais"; "Ce ne sont pas des plantes, ce sont des arbres" (à propos des bonsaïs); "Tu sais, les gosses c'est comme des cafards: il fait chaud, y'a à boire, y'a à bouffer, ils ne partent plus"; "On ne jette pas un pot de Nutella, c'est un principe de vie"; "Ce qui est fou avec les pâtes c'est que, selon leur forme, ça n'a pas le même goût"; "On ne comprend pas les gens si on ne comprend pas les arbres"; "Mon amour, je crois que tu es un petit peu con, parfois"; etc…

De beaux bonzaïs

Il y a heureusement quelques beaux bonzaïs, un gag final, et Stéphane De Groodt pour relever un peu le niveau, dans un personnage caricatural et à la limite de la simplicité d'esprit dans la première partie du film, mais plus complexe qu'il n'en a l'air et finalement pas si bête que cela: "Oui, ce n’est pas juste un doux-rêveur mais quelqu’un qui a une acuité, une perception des choses plutôt pertinente. Il sait comment fonctionne le monde et les gens qui l’entourent de par sa vie passée et à un moment donné, en effet, quand il faut être présent et dire les choses, il y va…", explique l'acteur.

La morale du film c'est qu'il faut se parler, s'expliquer, se dire les choses en face, même –et surtout– les moins agréables, à la fois entre mari et femme et entre les deux couples. "Aimer quelqu’un, ce n’est pas dire oui à tout… Parfois, c’est même de savoir dire non et d’avoir un regard lucide sur l’autre qui peut être le véritable amour. Évidemment que c’est agréable et bon de se dire des choses douces mais de temps en temps, quand c’est nécessaire, il faut savoir aussi mettre les points sur les «i»…", dit Michèle Laroque.

Mais pour exploiter l'idée de jeunes adultes qui s'incrustent chez leurs parents, on préférait l'originalité du film d'Étienne Chatiliez TANGUY en 2001 (avec Sabine Azéma et André Dussollier) et sa suite TANGUY, LE RETOUR en 2019.

Jean-Michel Comte

LA PHRASE

"Tu sais, les gosses c'est comme des cafards: il fait chaud, y'a à boire, y'a à bouffer, ils ne partent plus" (la meilleure amie de Michèle Laroque).

CHACUN CHEZ SOI

(France, 1h24)

Réalisation: Michèle Laroque

Avec Michèle Laroque, Stéphane De Groodt, Alice de Lencquesaing

(Sortie le 2 juin 2021)