Sur le chemin de la vie
Il y a deux ans, le réalisateur Pascal Plisson remportait un beau succès populaire (1,3 million de spectateurs) et critique (César du meilleur documentaire) avec SUR LE CHEMIN DE L'ÉCOLE, qui racontait le courage et la volonté dont faisaient preuve quatre enfants pour aller chaque jour à l'école dans quatre pays en voie de développement (Maroc, Kenya, Inde et Argentine). Deux ans plus tard il récidive avec LE GRAND JOUR, itinéraire de quatre adolescents qui se fixent un but, travaillent d'arrache-pied et attendent avec fébrilité mais détermination le jour de l'examen.
Albert, 11 ans, petite cicatrice sur la tempe droite, vit seul avec sa mère divorcée dans un quartier populaire de la Havane. Il rêve d'être le meilleur boxeur de Cuba mais doit faire attention à ses résultats scolaires s’il ne veut pas être privé d’entraînement. Il voit souvent son père, ancien boxeur, également attentif à ce que son fils travaille bien à l’école. Pour Albert, le "grand jour" sera le combat qui lui permettra (ou non) d'entrer à l'Académie nationale de boxe.
Nidhi, 15 ans, pastille rouge entre les deux sourcils et petit anneau à la narine gauche, vit à Benares, un État pauvre du nord-est de l’Inde, avec ses parents, ses grands-parents, ses trois sœurs et son frère. Elle veut devenir ingénieure mais sa pauvreté et le fait d’être une fille sont des obstacles qu’elle doit surmonter pour parvenir à réaliser son projet. La seule solution pour elle: réussir l’examen du programme solidaire "Super-30" qui retient les 30 premiers candidats parmi 5.000 postulants et leur offre des études. Pour Nidhi, le "grand jour" sera celui de l'examen, qui lui permettra (ou non) d'être dans les 30 premiers.
Tom, 19 ans, petite barbichette naissante, a quitté depuis deux ans ses parents et ses six frères et soeurs dans la banlieue de Kampala, en Ouganda, pour devenir interne à l’Uganda Wildlife Authority, l'école qui prépare à devenir ranger dans un des parcs naturels du pays. Passionné de nature et de vie sauvage, il révise de manière intensive afin d'obtenir son diplôme. Pour Tom, le "grand jour" sera également celui de l'examen, qui lui permettra (ou non) de réaliser son rêve et d'obtenir un métier.
Enfin Deegii, 11 ans, petites boucles d'oreille en forme de coccinelles, vit avec ses parents et son grand frère dans une modeste maison de la banlieue d’Oulan-Bator, la capitale de la Mongolie. Ce n'est encore qu'une enfant mais elle est extrêmement déterminée et a un rêve ultime: devenir contorsionniste professionnelle. Depuis cinq ans elle s'entraîne chaque jour avec ses camarades de l'école de gymnastique, tout en poursuivant sa scolarité. Pour Deegii, le "grand jour" sera celui de l'audition devant un jury qui décidera (ou non) de l'admettre dans un programme de formation professionnelle lui permettant de faire de sa passion son métier.
Pour les quatre adolescents de ces quatre pays différents, le "grand jour" est proche, après des mois, voire des années d'efforts. On passe de l'un à l'autre en vivant leur quotidien, leurs efforts, leurs espoirs et leurs craintes, jusqu'au jour-J en question. Avec un petit suspense: est-ce que les quatre réussiront?
L'idée du film est venue à Pascal Plisson il y a six ans quand, raconte-t-il, il a croisé un enfant d'une dizaine d'années dans un train en Russie. "Il venait d’un tout petit village de Sibérie et était assis à côté de moi. Je me souviens qu’il portait une chapka un peu pourrie et un survêtement. Un violon était posé sur ses genoux. Il lisait une partition. (...) Ses parents et son village s’étaient cotisés pour lui permettre de passer une audition dans une grande école de musique à Saint-Pétersbourg. J’ai trouvé cette démarche incroyable. Il se trouve qu’il a convaincu le jury et que sa vie s’en est trouvée changée. Il a obtenu une bourse et a fait la fierté de son village. C’est là qu’est venue l’idée d’un film sur des gamins passionnés qui se battent pour aller au bout d’un rêve précis".
Ambassadeur de l’association Aide et Action, le réalisateur se passionne pour l'enfance et l'éducation, qui change la vie dans les pays pauvres. Son film, scénarisé, se situe entre la fiction et le documentaire. Les situations et les dialogues n'ont pas toujours le ton du naturel, et les autorités des quatre pays ont autorisé ces tournages, mais ces quatre histoires sont authentiques, émouvantes, pleines d'espoir. Et tout cela est bien filmé: finis les documentaires caméra à l'épaule, aux images floues et au montage paresseux, ici c'est du vrai cinéma, basé sur quatre vrais destins qui ne font que commencer.
Jean-Michel Comte
LA PHRASE
"Je crois en toi. Ne me déçois pas" (l'entraîneur de boxe cubain, à Albert).
(France, 1h26)
Réalisation: Pascal Plisson
(Documentaire)
(Sortie le 23 septembre 2015)