Dany Boon en pleine forme
Dans SUPERCONDRIAQUE, où il interprète un malade imaginaire permanent, Dany Boom est en pleine forme et s'en donne à coeur joie. L'acteur n'a rien perdu de son ressort comique, rôdé par des
années de spectacles en one-man-show.
Dany Boon le réalisateur, lui, est un peu moins convaincant. A vouloir jouer sur plusieurs tableaux à la fois –comédie, romantisme, action–, son film, inégal, s'égare parfois en chemin. Mais
c'est l'aspect comique qu'on retient en fin de compte, après avoir quand même beaucoup ri.
Après un générique rigolo, on découvre ce personnage de Romain Faubert qui, lors d'une soirée de réveillon, se dépêche de s'enfuir avant les 12 coups de minuit. Il a la hantise de devoir
embrasser des dizaines d'inconnus: il craint les impuretés, les microbes, les maladies.
A bientôt 40 ans, il vit seul avec son hypocondrie chronique, qui en fait un maniaque de la propreté, un obsédé de l'automédication et un névropathe qui a peur de tout. Dans le métro il ne touche
pas les poignées et les barres, il se désinfecte les mains au gel hydroalcoolique toutes les cinq minutes, et il passe son temps sur Internet à rechercher les symptomes des nombreuses maladies
dont il se croit atteint.
Il n'a qu'un seul ami: son médecin traitant, le Dr Dimitri Zvenka (Kad Merad), qui le connaît –et supporte son hypocondrie– depuis 18 ans. Son malade imaginaire, difficilement gérable, lui gâche
la vie et il ferait tout pour s'en débarrasser.
Il pense avoir trouvé le remède pour cela: l'aider à trouver la femme de sa vie. Car sa vraie maladie, c'est la solitude. Il l'invite donc à des soirées chez lui, l'inscrit sur un site de
rencontre, lui donne des conseils de séduction, l'oblige à faire du sport. Trouver la perle rare s'avère difficile, mais...
Ce sujet de l'hypocondrie ''est très personnel'', affirme Dany Boon, qui dit avoir mis beaucoup de lui dans la description du personnage: ''Comme dans le film, j'ouvre les portes avec les coudes
et je me lave les mains après avoir composé un numéro sur un digicode. Je crois que je préfèrerais tomber dans un escalier plutôt que de me tenir à la rampe!''.
Même le personnage de Kad Merad est tiré de faits réels, ajoute Dany Boon: ''J'appelle mon médecin très régulièrement. Il s'appelle Roland, il apparaît d'ailleurs dans le film, et au bout de 20
ans c'est devenu un ami''.
Cette hypocondrie du personnage principal donne l'occasion des meilleurs gags et des nombreux numéros d'acteur de Dany
Boon, au jeu parfois volontairement appuyé, comme sur le principe des sketches ou du théâtre de boulevard. Face à lui, Kad Merad joue au contraire de manière sobre et posé, donnant une vraie
crédibilité à son personnage et un autre sens de l'humour.
Les dialogues, signés Dany Boon, sont bien ciselés –là aussi comme dans ses sketches– et le film ne manque pas de rythme. Le scénario, lui (Dany Boon toujours), est davantage tiré par les
cheveux, pour intégrer une histoire sentimentale pas très crédible et une rocambolesque affaire d'échange d'identité avec un rebelle d'un pays de l'Est.
Ces scènes, où le film s'aventure sur des chemins différents que le comique pur, permettent de mettre en valeur une actrice peu connue, la piquante brune Alice Pol, dans le rôle de la soeur du Dr Zvenka, activiste pour la défense des droits de l'homme dans le
pays de l'Est en question, dont elle et son frère sont originaires.
Mais même en plein romantisme ou en pleine action, l'humour reste présent, comme si Dany Boon le réalisateur privilégiait Dany Boon l'acteur, vraie bête de scène. Le clin d'oeil –tout cela n'est
pas très crédible mais c'est pour rire– est évident.
Car sur scène comme au cinéma, derrière et devant la caméra (c'est son quatrième film comme réalisateur), Dany Boon n'a pas oublié son objectif premier, qui avait ravi les 20,5 millions de
spectateurs de BIENVENUE CHEZ LES CH'TIS en 2008: ''Mon but principal, c'est de faire rire les gens et de
divertir mon public. Je le fais avec d'autant plus de sincérité que je pourrais arrêter de travailler! Je suis dans l'envie, pas dans le besoin...''.
Jean-Michel Comte
LA PHRASE
''Même les plus grands chênes ont un jour été des glands'' (Dany Boon, révélant sa véritable identité après s'être fait passer pour ce qu'il n'était
pas).
SUPERCONDRIAQUE
(France, 1h47)
Réalisation: Dany Boon
Avec Dany Boon, Kad Merad, Alice Pol
(Sortie le 26 février 2014)