Brie Larson, Oscar de l'amour maternel
C'est le rôle d'une mère élevant son enfant dans des conditions pas tout à fait normales qui a valu à Brie Larson, il y a quelques jours, l'Oscar de la meilleure actrice.
"Maman, j'ai cinq ans", dit le petit Jack. C'est la première phrase du film. Jack vit enfermé dans une chambre, où il est né et qu'il n'a jamais quittée. C'est une cabane au fond d'un jardin, dans laquelle sa mère est séquestrée et régulièrement violée depuis sept ans par un ravisseur que l'enfant, caché dans le placard pendant ses visites, ne voit pas et ne connaît que par le surnom de "Vilain Nick". Pas question de l'appeler papa…
La chambre a un lit, un coin cuisine, une baignoire, une télévision, et au plafond un velux qui laisse entrer la lumière, seul lien avec le monde extérieur. Quand il se lève, Jack dit "bonjour lampe, bonjour plante, bonjour armoire, bonjour lavabo".
Sa mère lui raconte des histoires, ils regardent ensemble la télé, ils fabriquent des guirlandes avec des demi-coquilles d'œufs, ils font des exercices de gym et des concours de cris. Pour Jack, "les écureuils et les chiens ne sont pas réels, ils sont dans la télé".
Mais pour ses cinq ans, sa mère a décidé de lui expliquer le monde extérieur et sa véritable histoire depuis sa naissance. Elle a décidé aussi qu'il était temps d'essayer de trouver un moyen de sortir de cet enfer, de s'échapper, de tenter le tout pour le tout. Quel que soit le choc que pourrait provoquer pour Jack ce contact avec le monde extérieur, quelles que soient les conséquences si la tentative d'évasion échoue -ou réussit.
La première partie du film, très émouvante, raconte ce huis-clos à la fois oppressant et rempli de tendresse entre la mère et l'enfant. Ensuite, pour éviter de savoir à l'avance comment aboutit la tentative d'évasion et quelles en sont les conséquences, autant éviter de lire la plupart des articles de presse (sauf celui de CinéGong, bien sûr) et de regarder la bande-annonce (ci-dessous), qui lèvent le suspense.
Room est le cinquième film du réalisateur irlandais Lenny Abrahamson, après quatre restés assez confidentiels (ADAM & PAUL en 2004, GARAGE en 2007, WHAT RICHARD Did en 2012 et FRANCK en 2014). Le réalisateur a été choisi par la romancière Emma Donoghue, qui a elle-même adapté son best-seller paru en 2010, qui s'inspirait de deux faits divers survenus en Autriche en 2006 et 2008: celui de Natascha Kampusch, retenue pendant huit ans et violée par son ravisseur avant de s'échapper, et celui d'Elisabeth Fritzl, enfermée pendant 24 ans par son père qui lui a fait sept enfants.
Le film, comme le livre, est essentiellement une ode à l'amour maternel et s'intéresse à la relation très forte qui unit la mère à l'enfant, avec quelques scènes à tirer des larmes aux spectateurs les plus endurcis. Bien sûr l'actrice Brie Larson est épatante dans le rôle, mais l'acteur le plus extraordinaire est le jeune Jacob Tremblay, 7 ans au moment du tournage, qui ressemble à une fille avec ses cheveux longs (sa mère ne les lui a pas coupés depuis sa naissance, en lui expliquant qu'ils faisaient sa force), et qui soulève une question récurrente: pourquoi n'existe-t-il pas d'Oscar du meilleur enfant au cinéma?
Jean-Michel Comte
LA PHRASE
"Les écureuils et les chiens ne sont pas réels, ils sont dans la télé" (Jack, le petit garçon).
(États-Unis, 1h58)
Réalisation: Lenny Abrahamson
Avec Brie Larson, Jacob Tremblay, Joan Allen
(Sortie le 9 mars 2016)