THE LOBSTER

Rachel Weisz et Colin Farrell en pincent l'un pour l'autre

Ils s'aiment. Oui mais... (©Haut-et-Court)
Ils s'aiment. Oui mais... (©Haut-et-Court)

Ce fut sans doute le film le plus fou du dernier Festival de Cannes, et c'est sans doute pour cela que le jury présidé par les frères Coen lui a décerné le Prix du Jury: THE LOBSTER, du réalisateur grec Yorgos Lanthimos, aborde d'une façon pour le moins originale les questions de la solitude, du célibat, de la vie de couple -et de l'amour.

Dans un futur décrit comme proche, toute personne célibataire est arrêtée, conduite dans un hôtel de montagne et, parmi toutes les autres personnes seules, a 45 jours pour trouver l'âme soeur. Passé ce délai, le (ou la) célibataire est transformé(e) en animal de son choix...

David (Colin Farrell), de nouveau seul dans la vie après 12 ans de mariage, débarque donc dans cet étrange établissement. On l'a autorisé à venir avec son chien -qui n'est autre que son ex-frère, transformé en animal après avoir raté l'épreuve du speed dating.

A son arrivée, on lui demande en quel animal il souhaite être transformé si lui non plus ne parvient pas à trouver une nouvelle compagne. Un homard (lobster, en anglais), répond-il: ces bêtes-là vivent plus de 100 ans, ont le sang bleu comme les aristocrates, et restent féconds toute leur vie.

Autour de l'hôtel aux célibataires, les "rebelles" se cachent dans la forêt. Pour eux, menés par une chef inquiétante (Léa Seydoux), les ordres sont inverses: pas question de vivre en couple, de fonder une famille, d'avoir des relations amoureuses. Célibat et solitude obligatoires. 

Régulièrement les célibataires de l'hôtel (qui ne veulent pas le rester) partent en chasse collectivement, avec des fusils à fléchettes anesthésiantes, pour ramener à l'hôtel des célibataires de la forêt (qui doivent le rester). A chaque prise, ils gagnent quelques jours de répit supplémentaires au-delà des 45 jours. 

David fait quelques tentatives pour trouver l'âme soeur -il faut se trouver un point commun pour former un couple-, mais c'est dans la forêt, parmi les rebelles, qu'il va croiser la route d'une femme (Rachel Weisz) qui semble avoir quelques affinités avec lui...

Quatrième film de Yorgos Lanthimos (après KINETTA, CANINE et ALPS), ce LOBSTER est le premier avec des vedettes internationales: John C. Reilly et Ben Whishaw (le jeune "Q" des derniers James Bond) s'ajoutent à la distribution. Derrière son scénario orignal, alternant un certain esthétisme (musique classique, ralentis) un peu ennuyeux et humour grinçant, le film est une réflexion sur la volonté ou le refus ou l'obligation sociale de vivre en couple, de fonder une famille, ou bien de choisir le célibat, voire la solitude. 

"Ce scénario vient de la vraie vie. La société met une telle pression sur les célibataires! Avec mon coscénariste Efthymis Filippou, (...) nous sommes partis de ce constat. On observe, on échange nos impressions, et qu’est-ce qu’on entend? Que le fait d’être seul est un sentiment d’échec. Qu’il faut vite trouver un partenaire, et cela passe par des stratégies…", explique le réalisateur dans une interview au Monde. Peut-on être heureux quand on est seul? Et, à l'inverse, jusqu'où peut-on aller pour prouver son amour à son âme soeur? La fin du film, avec une scène forte et effrayante, pose la question...

Jean-Michel Comte


LA PHRASE

"Chacun danse seul. C'est pour ça qu'on ne passe que de la musique électronique" (un des rebelles célibataires, dans la forêt).


THE LOBSTER

(Grèce, 1h58)

Réalisation: Yorgos Lanthimos

Avec Colin Farrell, Rachel Weisz, Léa Seydoux

(Sortie le 28 octobre 2015)