Dans son troisième film comme réalisatrice, après IL EST PLUS FACILE POUR UN CHAMEAU (2003) et ACTRICES (2007), Valeria Bruni Tedeschi continue de raconter sa vie.

UN CHÂTEAU EN ITALIE s'inspire en effet fortement de son passé, même si l'histoire est romancée et prend ses libertés avec la réalité.
VBT interprète elle-même le rôle principal, celui de Louise, une femme de 43 ans, ancienne actrice qui, désormais, a une priorité: devenir mère. Elle est célibataire mais rencontre, dans des circonstances insolites, un jeune homme de 20 ans son cadet, Nathan (Louis Garrel), lui aussi acteur.
C'est lui qui tombe amoureux et lui déclare sa flamme. Elle est plus réservée –la différence d'âge l'effraie un peu-- et le fait patienter. Car elle a d'autres soucis en tête, d'ordre familial.
Son frère adoré, Ludovic (Filippo Timi), est gravement malade: ''J'ai le sida'', lui annonce-t-il. ''Mais ce n'est pas grave, c'est une maladie comme une autre''.
Et puis il y a des ennuis d'argent pour la famille de la grande bourgeoisie italienne à laquelle appartient Louise. Sa mère (Marisa Borini) va être obligée de vendre le château de famille, en Italie, si riche de souvenirs mais dont l'entretien coûte si cher...
''Ce film pour moi n'est pas une auto-fiction'', dit Valeria Bruni Tedeschi. ''Il s'inspire de choses qui me sont arrivées, bien sûr, mais aussi de choses que j'ai observées, et de choses qui sont arrivées aux personnes avec qui j'écris'' (ses deux grandes copines, l'actrice-réalisatrice Noémie Lvovsky et la scénariste Agnès de Sacy).
N'empêche, elle a demandé à son ex (Louis Garrel) de jouer son amoureux et à sa vraie mère (Marisa Borini) de jouer sa mère. Et dans le film ressortent les obsessions qu'elle se reconnaît elle-même dans la vraie vie: le souvenir de son frère Virginio décédé du sida en 2006 (le film lui est dédié), les incertitudes sur le métier d'actrice (elle préfère maintenant être derrière la caméra), le désir de maternité (elle a adopté une petite fille aujourd'hui âgée de cinq ans), les interrogations sur une relation avec un homme beaucoup plus jeune (sa relation avec Louis Garrel a duré de 2007 à 2012), le sentiment de culpabilité d'appartenir à une famille riche quand on est de gauche (une scène du film la montre distribuant la soupe populaire avec des bénévoles), etc.
Le film –en compétition au dernier Festival de Cannes-- n'est cependant pas qu'une auto-psychanalyse sur grand écran, comme cela arrive souvent dans certains films intellos. Ici le mélange entre humour (parfois un peu bobo) et émotion (une formidable scène de son frère à l'hôpital) est savamment dosé, avec des touches gaies dans les moments tristes, et inversement. Un ton qu'on qualifie souvent de ''doux-amer'' pour cette histoire qui, sur l'écran, a une jolie fin.
Et le choix des acteurs est une réussite, principalement les rôles masculins. Louis Garrel ajoute à son charme naturel une décontraction et un sens de l'humour qu'on ne lui connaissait pas, et l'acteur italien Filippo Timi est d'un charisme extraordinaire dans le rôle du frère. Il y a aussi une composition savoureuse de Xavier Beauvois, à la fin, en ex de Louise, alcoolique, fauché et vindicatif.
Et il y a même la participation amusante d'Omar Sharif, qui apparaît quelques instants en fin de film. C'est le petit cadeau de Valeria Bruni Tedeschi à sa maman, fan absolue de l'acteur égyptien –dans le film comme dans la vie.
Jean-Michel Comte

LA PHRASE
''Votre petit Canaletto, si je le vends, je peux racheter la moitié du 11e arrondissement'' (Xavier Beauvois, fauché, venu réclamer une aide financière à Valeria Bruno Tedeschi).

UN CHÂTEAU EN ITALIE
(France, 1h44)
Réalisation: Valeria Bruni Tedeschi
Avec Valeria Bruni Tedeschi, Louis Garrel, Filippo Timi
(Sortie le 30 octobre 2013)